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mercredi 13 mars 2013

Traditions pascales



    Dès la Laetare passée, une véritable fièvre s’abattait sur les ménagères. Il était important que, pour Pâques, leur maison brille comme un sou neuf de la cave au grenier. C’était, dans chaque demeure, un ballet de brosses et torchons, des effluves de savon noir et d’ammoniaque.
    Tout devait être terminé avant le Jeudi Saint car d’autres occupations les attendaient : leur participation aux offices.
    Il fallait, ce jour-là, aller d’église en église, adresser une prière au Saint Sacrement exposé au milieu des fleurs pendant toute la journée.
    Quelques moments de recueillement et puis l’on passait à l’église suivante.
    Le but était d’en totaliser sept sur la journée pour obtenir une indulgence plénière, celle qui  sortait l’âme d’un défunt très cher du purgatoire pour l’emmener au paradis. Toute une comptabilité !
    Il y avait, dans la rue, un mouvement incessant de promeneurs.
    Les commerçants qui avaient, eux, été atteint de la même fièvre que les ménagères, avaient élaboré, après grand nettoyage, de splendides étalages pour présenter leurs collections de printemps à toute cette foule attendue de promeneurs occasionnels.
    Chacun rivalisait d’originalité et de prestige dans ses étalages, mais la palme appartenait aux bouchers et pâtissiers.
    Les bouchers avaient connu un recul des ventes pendant le Carême , profitable surtout aux poissonniers et crémiers. Pendant cette période plus creuse, ils avaient créé des présentations artistiques pour valoriser leurs produits.
    A côté des plus belles viandes, bien rouges, qui faisaient saliver les passants, on trouvait des montages de charcuterie, mêlant pâté de foie et saindoux dont ils faisaient des tableaux, des sculptures, tout ce que leur avait suggéré leur imagination.
    Il y avait un maître, dans ce domaine, rue de l’Ange, dont personne n’aurait voulu manquer l’étal.
    Je me souviens aussi d’une grande boucherie rue de Fer, à l’angle de la rue des Croisiers, qui avait créé, dans son hall, un parc avec de jeunes brebis et leurs agneaux, tout mignons, faisant la joie des citadins qui s’émerveillaient de leurs ébats.
    Ils sortaient leurs œuvres, en général, en cours d’après-midi du Jeudi.
    En même temps que les pâtissiers qui, eux, arboraient leurs gâteaux et montages en chocolat, leurs œufs multicolores de toutes tailles, garnis d’autres douceurs et, souvent, une multitude de poussins artificiels semblant picorer dans l’étalage.
    Ces évènements, religieux comme profanes, amenaient en ville la foule des grands jours, compensation à la période sévère du Carême et de la Semaine Sainte, souvent pluvieuse et froide, que l’on appelait d’ailleurs en wallon «Li pèneuse sam’winne ».
    Le lendemain, Vendredi Saint, il était interdit de consacrer et donc il n’était pas prévu de messe. Mais à 3 heures, heures de la mort de Jésus, un chemin de croix très suivi.
    Il était recommandé aux enfants silence et recueillement en signe de deuil : pas de grands cris dans leurs jeux, pas de musique à la maison.
    C’est tout juste si l’on ne nous demandait pas de pleurer la mort de ce Christ dont nous avions, certes, pitié, tout en connaissant depuis longtemps la fin de l’histoire, la Résurrection, qui, pour nous, enlevait un peu de sérieux au drame… puisque il finissait bien.
    Ce Vendredi Saint, il était conseillé aux mamans de cuire pain ou pâtisserie et surtout, surtout, de ne pas lessiver.
    En cause, une légende qui racontait que le Christ, chargé de sa croix et montant au calvaire, avait rencontré d’abord une lavandière qui lui avait jeté un seau d’eau sale. Tandis qu’une autre femme, compatissante, occupée à cuire son pain, en avait coupé une miche pour la lui donner.
    D’où un proverbe : «Bénie soit la femme qui cuit, maudite soit la femme qui lave»
    Que toutes les femmes, croyantes ou non, appliquaient avec une rigueur mêlée de crainte.
    J’en ai connu qui ont pleuré devant une lessive entreprise par inadvertance, ou qui ont abandonné ce travail en cours quand elles réalisaient la date fatidique.                                Monique

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